mardi 5 novembre 2019

Que dire de la Kirghizie?


 Tout d'abord, ce petit pays a plusieurs noms: Kirghizie, nom que l'on employait là-bas, Kirghizistan et Kirghisztan.
C'est un pays où les gens sont cools (Même les lacs sont cools, enfin "kul': Issy-kul, Song-kul, Chatyr-kul). C'est quand on est sortis de Chine que çà nous a frappés. Les 2 seuls militaires qui étaient à la frontière étaient en treillis et souriants; pas stressés et tirés à 4 épingles comme en Chine! On sent que le gouvernement ne crée pas l'angoisse. On a même pu photographier 3 policiers lors de la fête de l'indépendance et pas en cachette car ils ont posé. C'est un pays musulman modéré. La religion n'empiète pas sur les occupations. Les femmes paraissent libres. Bien sûr, les traditions sont encore quelquefois très pesantes. On a vu par exemple, une femme qui n'a pas pris de bière avec nous dans un bar à Osh au prétexte qu'il y avait 3 anciens à la table d'à côté. Elle nous a bien expliqué qu'il y avait 2 styles de vie en Kirghizie; l'un au sud traditionnel et religieux, l'autre au nord moderne et plus laïc.
Et quel accueil! C'est une tradition des nomades de donner le pain, le thé et autres aux personnes qui passent près de chez eux que ce soit des kirghizes ou des touristes. Ils n'attendent rien en retour et ils nous reçoivent vraiment avec plaisir.
Cà reste un pays assez pauvre avec peu de ressources naturelles. Le salaire mensuel  moyen n'est que de 200 €. Les villes et villages se sont développés tardivement, notamment lors de la période soviétique car les russes voulaient sédentariser les nomades; c'est pourquoi les rues se croisent à angle droit. Ils sont restés proches de la Russie et ne rejettent pas Poutine.
On peut voyager pour pas cher. Les vues de montagne sont fantastiques, mais çà manque vraiment de monuments, c'est dû à leur tradition de nomadisme. Ceci dit, les nuits dans les yourtes nous ont enchanté surtout qu'à chaque fois qu'il faisait froid, ils allumaient le poêle et là, il faisait très bon, voire trop chaud.
Et l'agence Ultimate Aventure est à recommander, tellement on se sent bien avec eux sur place à Bishkek et aussi dans le circuit avec leurs chauffeurs et leurs guides. A notre arrivée dans la nuit, chacun avait son nom indiqué à la porte de la chambre et leur petit-déjeûner est un régal.   
En résumé, une destination à recommander surtout si l'on aime la montagne.
Yves.

Que dire de la Chine?

Nous n'y avons passé qu'une semaine et donc vu peu de choses.
La demande de visa n'avait pas été simple avec un questionnaire très long. Il avait même fallu donner le numéro de téléphone de notre chef. Pas facile quand 10 personnes sur 11 sont en retraite!
A la frontière de l'aller, il avait fallu attendre devant un portail car ils fermaient pendant le repas: ils ferment aussi les week-end et les jours fériés. Au retour, nous avons attendu jusqu'à 16 h et nous avons alors traîné nos bagages sur plus d'un km dans un no man's land entre les 2 pays. On aurait cru un groupe d'immigrés.
Le contrôle à la frontière n'était qu'un apéritif. J'ai compté 12 présentations du passeport sur 90 km. Parfois, ils l'emportent et on attend quelquefois assez longtemps. Qu'en font-ils? Et sur ce même trajet, photos interdites. Le moindre détail peut être problématique, par exemple un "S" que l'on voit mal à cause du tampon qui a été mis dessus ou bien une page blanche laissée dans ce passeport. Pour le policier de base, c'est le règne de la peur: surtout ne pas faire d'impair et donc aussitôt, il en réfère à sa hiérarchie. Lors d'un contrôle avant le passage à la frontière pour le retour (à l'aller, nous nous tenions à carreau), j'ai voulu un peu m'opposer à l'ordre d'un jeune policier. Nous étions dans une salle immense. Mon contrôle était terminé. J'attendais donc les autres près de la sortie. Le policier m'a demandé de me mettre dans une petite salle annexe, je lui ai signifié que j'attendais les autres et que je ne gênais personne car nous étions seuls. Il a vu que cela n'allait pas être facile et m'a donc supplié ("Please, please...") d'aller dans cette petite salle. 
Pendant notre trajet vers le Mustagh-Ata, nous avons eu au moins 2 contrôles à l'aller. De même au retour.
Pour le retour vers la Kirghizie, environ 8 présentations du passeport.
En ville, chaque magasin, restaurant, hôtel, marché, parc a son portique et ses policiers.
A chaque feu, nous sommes flashés.
Devant les écoles, il y a une grosse barrière (barreaux de 15 cm de diamètre), 3 policiers en triangle: formation classique chez eux avec 3 objets qui sont le bouclier, un pique et un repoussoir (avec un arc au bout). En plus, il y a une rangée d'auxiliaires tenant bien droit une massue d'un m de long. Nous cherchions la porte d'entrée d'un parc et nous nous sommes approchés de l'entrée d'une école. Les policiers ont tout de suite été affolés et nous ont fait signe de nous éloigner. On a l'impression que le gouvernement dirige le pays en entretenant l'angoisse.
Notre guide nous a dit que s'il y avait un problème, il irait en prison. Il nous disait sans cesse de faire attention quand nous traversions les rues. Je lui ai demandé combien il y avait de policiers en Chine. Il n'a pas su ou pas voulu me répondre.
Sur le marché aux bestiaux de Kashgar, le groupe a été suivi par 2 jeunes. On aurait dit 2 gars qui cherchaient à nous voler quelque chose, mais je les ai vus parler à un policier. Nous les avons signalés à notre guide; celui-ci s'est approché d'eux, ne leur a pas adressé la parole et a conversé avec son téléphone.
J'ai été surpris de la modernité de la ville. Tous les 2 roues à moteur marchent sur batterie ainsi que beaucoup de voitures. Ils paient directement avec leur téléphone. Les bâtiments n'ont rien à envier aux nôtres.
Une chose qui nous a étonnés, c'est l'absence de terrasses de café. On ne peut boire qu'à l'intérieur des hôtels ou au restaurant.
Nous n'avons pas eu le temps de parler aux habitants. En pleine ville, les gens n'ont pas l'air malheureux. Je pense que la plupart adhère au nouveau système de "contrôle social" basé en grande partie sur la reconnaissance faciale. Il en résulte un système  qui récompense ou pénalise les citoyens. Extrait du journal 20 minutes; "Certains sont carrément interdits d'avion ou de train. Si, dans la capitale on a plus de chances de trouver un job avec un crédit élevé, dans la ville de Qinghuangdao, la récompense prend la forme d'un « certificat de citoyen modèle » ou d'un examen médical annuel gratuit".
Pour parler du Xinjiang: cette région est habitée par des ouïghours qui sont musulmans. Ils étaient indépendants, mais la Chine les a absorbés comme le Tibet. Le gouverneur du Tibet ayant bien fait son travail en écrasant le Tibet, on l'a nommé gouverneur du Xinjiang. Il y a eu quelques attentats et c'est l'excuse pour écraser la région. On dit qu'il y a 1 million de ouïghours en prison, soit 10% de la population. Le gouvernement chinois a d'abord nié cet état de fait, puis il a dit que les centres de détention étaient des écoles de formation. Les quelques personnes interviewées que l'on voit dans le document récent d'Arte se plaignent de sévices... Cette année, c'est l'intellectuel ouïghour Ilham Tohti, condamné à la prison à vie qui a eu le prix Sakharov des droits de l'Homme.
La Chine est une puissance colonisatrice assez récente: Xinjiang, Tibet, nord de l'Inde; elle considère Taïwan  comme une province à elle. La méthode est simple: amener de nombreux hans (la population majoritaire) dans les régions envahies , si bien que celle-ci devient majoritaire sur place. On dit qu'il n'y a plus que 40% de tibétains au Tibet. Une autre façon d'intégrer ces ouïghours est de les "encourager" (en échange de liberté, d'argent...) à se marier avec un han.
Personnellement, ce pays me fait peur. Il va dominer le monde d'ici peu en dépassant les Etats-Unis. Ils ont construit des routes qui rentrent profondément dans les pays voisins (Népal par exemple). Ils construisent des infrastructures dans des pays pauvres et comme ceux-ci ne peuvent pas payer, ils se paient en matières premières, en terres cultivables...
Tout le peuple est conditionné, les très rares opposants sont internés. Quand on pense qu'ils ont accès à un internet restreint: pas de Facebook, de Twitter, de Youtube, de Google. Je signale à notre guide d'aller voir mon blog pour voir ce que j'écris chaque jour de voyage; il me répond qu'il ne pourra pas y avoir accès.
A chacun de se faire sa propre opinion. Il suffit d'aller sur internet (accessible à tous chez nous) pour se faire une idée. 
En conclusion, je fais mienne cette maxime: "La France est un paradis habité par des gens qui se croient en enfer".
Yves.